Qu’est-ce que la Trinité ?

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Homélie prononcée le 31 mai 2021

Frères et Sœurs,

Nous célébrons ce matin la sainte Trinité, c’est-à-dire ce que Dieu est en lui-même, dans son être éternel. Il est communion du Père et du Fils dans l’Esprit-Saint. Et si nous célébrons le mystère de la Trinité, le cœur de Dieu tel qu’il s’est révélé, c’est parce que nous sommes intiment liés à ce mystère, c’est parce que notre humanité, dans son essence la plus profonde, est inséparable de ce cœur divin.

Nous sommes créés par un dieu qui est, en lui-même, communion d’amour, et nous lui ressemblons. C’est pour cette raison que chacun et chacune d’entre nous ne s’accomplit vraiment et pleinement qu’en faisant grandir autour de soi la communion des uns avec les autres et avec l’univers, communion qui n’est pas d’abord communauté d’intérêt, dominée par l’avoir et par le profit, mais communion d’amour qui repose avant tout sur le désintéressement, sur l’être, et sur le don gratuit.

Nous sommes à l’image d’un dieu qui est absolument transcendant et au-delà de tout, mais qui n’est pas solitaire, parce qu’il est en lui-même parfaite communion d’amour du Père et du Fils, remise totale de soi-même à l’autre, contemplation infinie de l’être aimé. C’est pour cette raison qu’il ne nous sauve jamais séparément les uns des autres, mais toujours ensemble, en peuple, en église, en communauté les uns avec les autres. Être sauvé par le Dieu Trinité, le Dieu trois fois saint, c’est entrer dans la communion des saints qu’il est lui-même, et qu’il nous ouvre par le Fils éternel devenu l’un de nous.

Le Dieu qui nous crée, qui nous donne l’existence, est en lui-même communion du Père et du Fils qui se donnent totalement l’un à l’autre, si bien que leur don réciproque est lui-même la personne divine de l’Esprit-Saint, l’amour ou la charité de Dieu. Et c’est à cause de don total inscrit dans le cœur de Dieu que nous ne goûtons pas le vrai bonheur sur la terre tant que nous ne nous donnons pas vraiment, nous aussi, à celles et ceux que nous aimons, et, plus précisément, tant que ce don de nous-mêmes à ces êtres, ces choses et ces situations ne va pas jusqu’à Dieu.

Car c’est bien jusqu’à Dieu qu’il nous faut ultimement nous donner, si nous voulons rester libres quand nous aimons tout ce qu’il met sur notre route. C’est bien en restant dans l’amour de Dieu que nous garderons notre liberté au milieu de tout ce qui nous absorbe et à quoi nous consacrons notre vie. Car, si nous focalisons entièrement notre attention et notre énergie sur tel individu particulier, telle cause, telle activité, en en faisant un absolu et une idole, alors nous nous enfermons dans notre monde, et nous ne sommes plus dans l’Esprit-Saint, dans la liberté de Dieu. Par notre baptême au nom de la Trinité, Père, Fils, Esprit-Saint, nous sommes les enfants d’un dieu qui libère « à main forte et à bras étendu », comme l’a rappelé la première lecture, et qui nous tire des esclavages et des liens dans lesquels nous sommes capables de nous emprisonner. Ce Dieu trois fois saint travaille à notre libération en venant éclairer, purifier, rectifier nos affections, nos grands engagements, et nos besoins de nous donner, en les transformant en véritable charité divine, ouverte à celles et ceux qui sont en dehors de nos horizons pour que nos cœurs, nos familles et nos communautés se laissent porter par l’universalité même de Dieu.

Mais alors, Frères et Sœurs, il faut bien le dire maintenant : d’où vient la Trinité ? Le mot Trinité n’est pas dans l’Évangile ni dans la Bible.

Il est apparu timidement au IIe siècle chrétien en Orient, avant de s’affirmer en Occident au début du IIIe siècle, sous la plus de l’écrivain chrétien Tertullien, à Carthage, dans l’actuelle Tunisie. Dans le mot « Trinité » nous entendons le mot « trois » et le mot « unité », car il s’agit de dire en même temps que Dieu est UN – c’est la grande confession de foi d’Israël – et que, tout en étant UN, il est plus profondément l’unité de trois personnes divines, le Père, le Fils et l’Esprit-Saint. Un seul Dieu, comme en Israël, et non pas trois ou plusieurs dieux, comme dans les religions païennes.

Et il a fallu des siècles de débats et de disputes entre théologiens, évêques et papes, des siècles d’hérésies et de conciles pour arriver à s’entendre entre l’Orient et l’Occident sur la façon de parler de Dieu.

La foi chrétienne est monothéiste. Elle ne reconnaît qu’un seul Dieu, comme le font également le judaïsme et l’islam. Mais, à la différence du judaïsme et de l’islam, la foi chrétienne tient que Dieu n’est pas une seule personne, comme nous le sommes nous-mêmes, chacun et chacune d’entre nous, mais qu’il est, en même temps, trois personnes.

Et d’où cela vient-il ? Vous le savez, Frères et Sœurs.

Cela vient de Jésus. Cela vient du Christ qui, non seulement fait des miracles extraordinaires dans l’Évangile, mais qui, surtout, ose dire ce que personne avant lui ni après lui n’a jamais dit en Israël : « Moi et le Père, nous sommes UN » (Jn 10,30), c’est-à-dire, moi et Dieu le Père nous ne faisons qu’un, lui en moi et moi en lui. Et juste avant de mourir, quand le grand-prêtre lui demande « es-tu le Fils du Béni ? » (Mc 14,61), Jésus lui répond : « je le suis, et vous verrez le Fils de l’Homme siéger à droite de la puissance », c’est-à-dire partager le trône de Dieu, être son égal. Jésus est accusé de blasphème, et il est mis à mort parce qu’il s’est fait l’égal de Dieu, parce qu’il a prétendu être le Fils unique de Dieu égal au Père.

C’est pour cela que la mort de Jésus en croix est liée à sa divinité, à son égalité avec Dieu le Père, dans leur intimité d’amour qu’est l’Esprit-Saint. C’est pour cela que la Croix et la Trinité sont intrinsèquement liées. C’est pour cela que le signe de la Croix est le signe même de la Trinité, commun à tous les chrétiens dans le monde entier.

Frères et Sœurs, la révélation de la Trinité a coûté cher. Elle s’est faite au prix de la mort du Fils bien-aimé. Seulement voilà, cette mort s’est accomplie dans l’amour et dans la miséricorde : « pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Et cette mort a ouvert le passage vers la résurrection glorieuse de ce Fils qui a désormais tout pouvoir au ciel et sur la terre, comme nous l’avons entendu dans l’Évangile, c’est-à-dire tout pouvoir pour transformer un jour nos pauvres corps et les rendre semblables à son corps glorieux, nous dit saint Paul (Ph 3,21). C’est la promesse de Jésus lui-même dans saint Jean : « je reviendrai vous prendre auprès de moi, pour que là où je suis, vous soyez vous aussi » (Jn 14,3).

Bienheureuse Croix du Christ qui nous a révélé la Trinité dans son mystère d’amour, et qui, dans le même élan, nous a révélé notre humanité dans son avenir de splendeur et de joie.

Nous venons d’une communion d’amour qui nous crée. Nous sommes portés à chaque instant par une communion d’amour que nous voyons plus ou moins, et qui éclate au grand jour dès qu’une grande catastrophe déclenche des mouvements de solidarité entre les hommes.

Plus clairement encore, notre vie chrétienne est marquée, jalonnée par la communion d’amour de la Trinité, à travers le signe de la croix, à travers le credo dont la structure est trinitaire, à travers la liturgie de la messe qui s’adresse au Père, par le Fils, dans l’Esprit, tout cela pour nous les hommes et pour notre salut, c’est-à-dire, pour que toutes nos communions d’amour soient vécues et grandissent dans la liberté de l’Esprit, dans la liberté des cœurs et dans la vraie joie, en traversant les épreuves, les souffrances et même la mort.

Et nous allons vers la communion des personnes avec Dieu et entre elles, vers la Jérusalem céleste. Nous n’allons pas vers la fusion des individus dans un grand tout uniforme qui ferait disparaître chacun de nos visages. Non. Nous allons vers cette société des saints où chacun et chacune d’entre nous sera transfiguré par la lumière de Dieu. Et nous nous reconnaîtrons, émerveillés par tant de bonté.

Si nous le voulons bien, cet avenir commence dès ici-bas sur la terre, dans notre vie spirituelle et dans la conversion de nos relations fraternelles. Alors, Frères et Sœurs, que le Dieu trois fois saint nous bénisse maintenant. Qu’il réchauffe entre nous la foi, l’espérance et la charité qui nous unissent, pour que nous portions à notre monde la lumière de son amour. Amen.

Père Patrick Faure

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